Servian est un village au passé lourd d'histoire !

 

Ses racines remontent en effet à 6000 ans avant Jésus-Christ ainsi qu'en témoigne, lors de charruages de la terre, la mise au jour de champs funéraires avec des poteries, des silex...

 

En choisissant d'habiter Servian parce que nous y avions trouvé un terrain pour y construire notre maison à la retraite de Jean-Louis, j'ignorais qu'il aurait des similitudes assez insolites avec la ville de mon enfance : comme Constantine mais à une échelle moindre, il se trouve sur un rocher et comporte -toujours dans les mêmes proportions- une place de la Brèche ; enfin comme Constantine ses origines sont largement liées à l'antiquité romaine.

 

Le nom même de Servian prête à caution puisqu'il proviendrait soit de Cervius de Cerf (figure héraldique des armoiries de la ville), soit de Servius, nom d'homme latin, propriétaire d'un domaine dit Servianus.

 

Sa situation géographique au sein d'un triangle formé par la voie Domitienne qui menait de l'Italie à l'Espagne, la transversale montagnarde vers le Gard, le Tarn et l'Aquitaine et l'axe vers la Gaule en faisait une cité prospère grâce notamment à la culture du blé et de l'olive. Cette apparente richesse va attirer les convoitises germaniques, ibères, arabes et c'est dans un réel climat de terreur que l'urbanisation médiévale servianaise s'établira : construction de la première enceinte de la cité dans la première moitié du XIe siècle et du second rempart vers la seconde moitié du XIIe siècle. C'est ce tracé de deux constructions concentriques qui donne au village son aspect de circulade.

 

Le village s'est ainsi développé à flanc de coteau avec à ses pieds le lit de la Lène, un ruisseau qui peut devenir un véritable torrent par pluies très violentes.

 

Servian était un bourg cathare : il se dit même aujourd'hui qu'une école cathare y vit le jour sans toutefois l'attester vraiment pour le moment : quoi qu'il en soit le village voit arriver un jour deux hommes aux cheveux longs vêtus de bure : ils sont munis d'un parchemin : l'évangile selon Saint-Jean et son apocalypse. Il s'agit de deux Parfaits venus haranguer la foule contre l'église romaine qui se vautre alors dans la turpitude et la débauche et dont l'archétype même se trouve être l'archevêque de Narbonne, Béranger. Si en premier lieu l'accueil est plutôt réservé, l'esprit de pureté invoqué par les deux Bonshommes et le manquement évident du clergé aux devoirs de sa charge font leur chemin. De nombreux ouvrages attestent dès lors de l'appartenance du bourg au catharisme...

 

En tant que village le plus avancé à l'est de l'hérésie cathare, Servian sera donc la première étape depuis Montpellier visitée par deux religieux espagnols (dont celui qui deviendra plus tard Saint-Dominique) plus ou moins chargés par le pape d'apporter leur aide à ceux qu'il a envoyés dans sa croisade religieuse contre ce dangereux fléau que constituait pour l'église romaine cette nouvelle religion.. et c'est tout naturellement après l'assassinat du premier légat du pape Innocent III Pierre de Castelnau à Saint-Gilles, la première place forte conquise par l'armée d'Arnaud-d'Amaury (dans la sinistre croisade des Albigeois), sans grande lutte pour dire vrai car les habitants apeurés se réfugièrent à Béziers pour y trouver la fin que l'on sait lors du massacre de ses quinze mille habitants.

 

Estève de Servian - de la seule famille connue régnant à Servian - adjure alors l'hérésie cathare vraisemblablement plus par souci de conserver la vie que par conviction religieuse, mettant ainsi un terme à l'épopée cathare du bourg issue d'une liberté de pensée propre au Midi moyenâgeux qui n'en était d'ailleurs pas à se première hérésie.

 

Grâce à une amie servianais, Nicole, qui a bien voulu m'accompagner et me guider dans ma visite du centre historique et grâce aussi à un petit guide Servian, Bourg Cathare élaboré par la mairie, j'ai pu repérer les principales curiosités et surtout leur donner un nom. Pour plus de commodités les photos sont présentées sous forme de vignettes (sur lesquelles il suffit de cliquer pour en avoir une vue plus confortable).

 

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vue générale de Servian depuis la route de la Grassettte

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l'Eglise Saint-Julien et Sainte Basilisse : sa construction est passée par trois stades : au XIIIe siècle, l'édifice se limite à un bâtiment modeste constitué par le porche actuel et la première travée avec un style roman très caractéristique ; les deux moitiés du XVIe voient l'église s'agrandir notamment par le prolongement de la nef et l'érection d'un clocher donjon.

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place Royale

j'ai un peu traficoté la photo car il y avait une descente de gouttière bien incongrue qui cachait la plaque et j'en ai profité pour lui restituer le nom exact car selon les archives communales il s'agirait bien de la place dédiée à Louis VIII dit le Lion, Seigneur de Servian et non Louis XVIII qui ne semble avoir ;aucun lien avec la ville.

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Servianus

selon la tradition populaire il pourrait s'agir d'une sculpture représentant la tête de Servianus, créateur du village, mais rien ne l'atteste.

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vue sur la plaine depuis la première enceinte la destruction de maisons vétustes restitue la vue telle qu'elle se présentait aux yeux des Servianais de l'époque

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la chapelle seigneuriale ou chapelle des pénitents possède deux oculus obturés et des ouvertures romanes. Elle a été fermée en 1792 par le Directoire de Béziers

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tour crénelée  située à côté de la chapelle et qui pourrait appartenir à l'ancien château seigneuriale détruit

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la maison du Bulgare. Il n'y en a jamais eu à Servian mais la pensée cathare ayant vu le jour en Europe centrale, bulgare devint synonyme d'hérétique, d'oû boulgre ou bougre

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Passage de l'Amict, rue du Porche (du latin amict : jeté autour, ce qui a donné naissance d'une part à une pièce d'étoffe portée par le prêtre quand il officie et d'autre part à voie périphérique ou chemin de ronde

la Pompe d'Encros dont le puits a alimenté le village jusqu'aux alentours de 1960. elle ne date pas du Moyen-Age mais témoigne des puits situés dans l'enceinte du village pour l'apport en eau pure aux Servianais

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premier rempart, à l'appui duquel se sont élevées des maisons

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et seconde enceinte dont  l'érection est estimée au XVe s

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maison restaurée avec fenêtres à meneaux telle que Servian pouvait paraître au M-A

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Une âme charitable pourra peut-être me donner l'identité de ce buste ?

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le porche de l'une des toutes premières écoles servianaises

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Porte de la maison Consulaire au linteau en arc en anse de panier, cloutée avec son bois d'époque et ses ferrures martelées à la main

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Marché couvert dans l'ancien centre vital de Servian. La halle était surtout destinée au grain et les produits étaient vendus sur la place publique

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Porte du Comboulas, troisième porte de la première enceinte

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la Chapelle des Capucins appartenant  aux Estève de Pradel

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Le jardin du Cloître de la chapelle des Capucins

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la maison  des Estève de Pradel, descendants des Estève de Servian

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rue des Baumes :  on distingue la tour de guet sur le premier et second remparts

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aqueduc relié à une noria en cours de restauration par une association de réinsertion de jeunes délinquants

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intérieur de la chapelle des Capucins en cours de restauration

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porches d'anciens commerces

 

 

 

sources :
histoire de Servian par Jacques Astor
Servian, bourg cathare 2000 ans d'histoire par M. Th. Crouzet et G. Labatut

Grand merci à Henri pour la musique midi qu'il m'a trouvée pour agrémenter cette page.